Pertes et dommages, finance, atténuation… quel bilan pour la COP27 ?

publié le 05 décembre 2022

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Bilan COP27©laurencesoulez_AdobeStock

La Conférence de Charm el-Cheikh sur les changements climatiques s’est close le 20 novembre dernier. Avec 39 heures de retard, seule la COP19 à Madrid avait duré plus longtemps. Le signe d’âpres négociations qui, comme attendu, ont tourné autour de la finance climat, de la gestion des conséquences du changement climatique et des nouvelles ambitions de réduction des émissions. 

Les nombreux points de blocage avaient fait planer l’ombre d’une absence d’accord final pendant la deuxième semaine, mais les dernières heures ont permis l’adoption d’un texte final, dont on retiendra avant tout la création d’un fonds d’aide pour les pertes et dommages, mais sans avancées significatives pour lutter contre les causes du changement climatique.

Pertes et dommages : l’accouchement douloureux d’un fonds historique

Cela faisait trente ans que les pays souffrant des conséquences du changement climatique réclamaient une aide des pays développés, premiers responsables de ce phénomène, pour faire face aux « pertes et dommages ». Jusqu’alors, ces derniers s’opposaient à tout mécanisme financier et au principe de réparation et de compensation pour leurs émissions passées. Mais les catastrophes climatiques récentes et les revendications du continent africain, qui accueillait cette COP, ont placé ce sujet au cœur des discussions.

Au-delà de la création du fonds, plusieurs initiatives ont été annoncées pour répondre aux pertes et dommages, dont le montant global de limite à 350 millions de dollars.

Finance climat : des jalons importants ont été posés

Le rétablissement de la confiance entre les pays du Nord et du Sud, sur fond du non-respect de la promesse de l’aide de 100 milliards de dollars par an promise pour 2020 par les pays développés, était l’un des principaux enjeux du sommet. Le sujet de la finance climat a ainsi été largement débattu.

Causes du changement climatique : une stagnation par rapport à Glasgow

Principal sujet de la Conférence de Glasgow, dont l’objectif affiché était de maintenir en vie l’objectif de limiter le réchauffement à 1,5 °C, la réduction des émissions de gaz à effet de serre n’a pas réellement progressé lors de celle-ci. Au moins, les éléments du Pacte de Glasgow en la matière ont été maintenu, ce qui n’était pas gagné. Plusieurs Etats souhaitaient en effet abandonner les références à la cible de 1,5 °C pour évoquer plutôt la barre des 2 °C, mais le G20 qui s’est tenu pendant la deuxième semaine a confirmé l’objectif initial.

Concernant les combustibles fossiles, la « réduction progressive du charbon » mentionnée dans le Pacte de Glasgow a été reprise en ces termes. L’Inde avait pourtant proposé de l’étendre à l’ensemble des combustibles fossiles, avec le soutien notamment de l’Union Européenne, les Etats-Unis, l’Australie et l’Amérique Latine. Mais cette proposition, peu relayée par la présidence égyptienne, s’est heurté à l’opposition ferme de la Russie et de l’Arabie Saoudite.

Quelques initiatives en marge de la décision finale sont toutefois à signaler :

Quant aux contributions déterminées nationalement, ces objectifs de réduction des émissions que les Etats se fixent, les progrès sont maigres. Le groupe des petits pays insulaires réclamait un programme de travail pour réduire les émissions globales dès maintenant et les diviser par deux d’ici 2030, tandis que l’Union Européenne souhaitait de nouveaux engagements en ligne avec l’objectif de 1,5 °C en échange de son soutien à un fond sur les pertes et dommages. Mais ils ont fait face au refus des pays en développement de prendre une part plus importante des efforts de réduction des émissions de gaz à effet de serre, renvoyant la responsabilité aux pays développés, à l’origine de l’essentiel des émissions passées.

Ces divergences ont eu raison de toute nouvelle ambition dans le texte final. Si celui-ci « constate avec inquiétude » que les contributions déterminées nationalement par les Etats ne permettraient de réduire les émissions de seulement 0,3 % en 2030 par rapport à 2019, loin des 43 % requis pour limiter le réchauffement à 1,5 °C, il ne fait que répéter la demande faite à Glasgow aux Etats de soumettre de nouvelles contributions, sans leur imposer individuellement d’objectifs et sans mécanisme de sanctions. Un programme de travail a été lancé, à la fois pour rehausser les promesses des Etats et pour les réaliser.

Agriculture, sécurité alimentaire… d’autres enjeux à l’ordre du jour

Cette Conférence ne s’est bien entendu pas limitée à ces sujets. 

Quelles suites ?

Sharm el-Sheikh passera l’an prochain le relai à Dubaï, hôte de la COP28. Mais avant cela, c’est une autre COP qui cristallisera les attentes des défenseurs de l’environnement : la COP15 sur la biodiversité hébergée à Montréal du 7 au 19 décembre 2022 – elle était initialement prévue en 2020 à Kunming (Chine). Des ponts ont été établis entre la Conférence égyptienne et la canadienne, lors de la journée de la COP27 dédiée à la biodiversité plusieurs personnalités clés de l’accord de Paris, dont Laurent Fabius, ont appelé à un accord d’une ampleur similaire, rappelant que les objectifs climatiques ne peuvent être atteints sans endiguer la destruction de la nature.

Sources : UNFCCC, Carbon Brief, IDDRI, Le Monde