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Un printemps 2021 particulièrement frais à Paris : quelle signification face au réchauffement climatique ?
Si l’on relève en Europe de l’ouest des températures plus fraîches que les normales saisonnières, le printemps 2021 n’a pas été aussi frais partout sur le continent. Le mercure dépassait à la mi-mai 30 °C en Sibérie !
Décryptage.
Le bulletin climatique réalisé par Météo-France pour les mois de mars à mai 2021 (le printemps « météorologique ») nous permet d’analyser les températures relevées à Paris dans le temps.
La série continue des mois « chauds » (anomalie de température moyenne positive), entamée depuis juin 2019, s’est effectivement interrompue en avril 2021 à Paris. Mais un printemps frais en Europe occidentale ne marque pas pour autant la fin du réchauffement climatique qui est un processus évalué à l’échelle planétaire et qui s’appréhende sur des séries plus longues.
L’Agence américaine d’observation océanique et atmosphérique indique même qu’à l’échelle de la planète, avril 2021 est le 9ème mois d’avril le plus chaud depuis 1880 !
Comment expliquer un printemps un peu frais à Paris dans un contexte de réchauffement climatique ?
Comme on peut le voir sur le graphe ci-dessous, sur la période de mars à mai, 2021 est la 7ème année la plus froide depuis 1950, mais seulement la 65ème depuis 1873.
Graphique d’évolution des anomalies de températures moyennes à Paris-Montsouris depuis 1971, Météo-France
Le printemps est une saison de transition où peuvent se faire sentir aussi bien les influences des masses d’air polaire encore froides, que celles des masses d’air tropical, déjà chaudes. La variabilité interne du climat peut-être forte à cette saison. Les trois épisodes de pics de chaleur qui ont eu lieu n’ont pas suffit à compenser les températures minimales basses qui ont persisté de mars à mai.
Un printemps marqué par des gelées matinales importantes
Nous avons tous en tête les images des vignobles éclairés par les feux allumés pour les protéger du gel. Les gelées matinales sont en effet la marque de ce coeur de printemps. Ces gelées matinales sont survenues tardivement, détruisant ainsi les bourgeons de certaines récoltes. En Île-de-France, ces gelées ont commencé le 6 mars, et la dernière offensive de gel a eu lieu le 7 mai.
Paris a connu moins de jours de gels que le reste de l’agglomération francilienne. En cause ? l’effet d’îlot de chaleur urbain, provoqué par la densité des habitations et le caractère minéral des villes qui empêchent la chaleur de s’échapper la nuit.
La carte ci-dessous réalisée par Météo-France illustre parfaitement ce phénomène. On note ainsi 0 à 4 jours de gel au coeur de l’agglomération parisienne, contre plus de 10 jours en général hors agglomération, et même localement 20 à 30 jours.
Cumul du nombre de jours avec gelée, Météo-France
Encore des records
Une bouffée de chaleur exceptionnelle fin mars
L’après-midi du 31 mars est la plus chaude jamais observée sur 75 ans de données au niveau national ! Avec 24.1 °C, cette journée a battu le record précédent qui tenait depuis trente ans.
Il n’est pas possible d’attribuer ce type d’événement uniquement au changement climatique : il s’agit d’un événement rare et très limité dans le temps, qui est principalement la conséquence d’une situation météorologique synoptique particulière. En revanche, la fréquence et l’intensité de ce genre de phénomènes devraient augmenter avec le réchauffement planétaire.
Du soleil, encore du soleil !
Le soleil a brillé pendant 315,5 heures du 23 mars au 27 avril 2021 à Paris ! C’est la troisième série la plus ensoleillée depuis 1991, 2007 et surtout 2020.
En revanche, on note moins de soleil en mai : le 1er mai 2021 a été le 6ème 1er mai le plus maussade depuis 1991 !
Que dit la pluie ?
L’indicateur de sécheresse météorologique qui mesure les déficits de précipitations, ici pour février-mars-avril, indique que la moitié Est de l’Île-de-France a été déficitaire en pluie. La période est même qualifiée d’extrêmement sèche sur le sud Seine-et-Marne.
En se limitant à la période la plus sèche de ce printemps, du 19 mars au 04 mai, on s’aperçoit que le cumul de 36,6 mm à Montsouris est le 19ème cumul le plus faible depuis 1900. Les années précédentes 2020 et 2019 sont à peu près similaires, avec seulement 30 et 35 mm relevés.
Partie de son record mensuel absolu en février, l’humidité des sols en Île-de-France a « dégringolé » en mars et avril, ils sont devenus modérément secs localement en Seine-et-Marne.
Quel temps pour les communards ?
A vrai dire, on ne saura jamais avec précision quelle était la température de ces jours-là, car il n’y a pas eu de relevés météorologiques pendant la semaine sanglante. Il s’agit de la seule interruption des mesures pendant les 150 ans qui se sont écoulés depuis l’événement. Les valeurs de températures ont été estimées sur la base d’autres observations. Voici ce que l’on peut dire :
- 1871 et 2021 sont deux printemps aux températures similaires. Il a fait environ 11,1 °C en 1871, et 11,5°C en 2021
- Les températures ont oscillé entre -1,1 °C et 28,2 ° en 1871, contre 0,1 °C et 28,1 ° C en 2021.
- 1871 reste un peu plus frais : il faut rappeler que l’îlot de chaleur à cette époque était moins impactant qu’aujourd’hui.
Et cette année, ce ne sont pas les Versaillais qui ont conquis Paris et les rives du périphérique, mais bien les coquelicots !