Le projet Hestia adapte la livraison aux enjeux climatiques et urbains

Hestia résulte-t-il d’une politique interne engagée dans les préoccupations actuelles ?

Hestia est un projet porté par le groupe Monoprix. Dans une logique d’implantation urbaine, ce dernier a toujours cherché à mêler respect de l’environnement et services urbains, pour répondre aux besoins évolutifs de ses clients. Nous avons ainsi déjà mis en place de nombreuses actions concrètes : camions fonctionnant au gaz naturel, choix du train ou du transport fluvial quand cela est possible, signature du Pacte nationale de lutte contre le gaspillage alimentaire, etc. Aujourd’hui, Monoprix a réduit de près de 23 % ses émissions de CO_² depuis 2008.

Quand Urban Lab a lancé son appel à candidatures dans le cadre de la création du quartier d’innovation urbaine Paris-Rive-Gauche, dans le 13^e arrondissement, nous avons décidé de proposer notre candidature. En faisant partie des 15 lauréats, nous avons pu y déployer nos différentes solutions, et les tester sur le terrain : offrir des modes de livraison adaptés aux besoins actuels et davantage respectueux de l’environnement.

Quels sont précisément ces nouveaux services ?

Nous avons travaillé sur plusieurs leviers liés à la livraison urbaine. Premièrement, il s’agissait d’améliorer les conditions de travail de nos livreurs. Nous avons amélioré l’ergonomie de leur poste et réduit la pénibilité quotidienne.

Pour les livreurs à pieds, plusieurs tests ont été réalisés : harnais pour réduire la charge ressentie, chariots amovibles pour faciliter le passage des trottoirs ou des marches et poignets porte-sac pour réduire les blessures aux mains. Nous avons également équipé chaque livreur à vélo de casque, rétroviseur, porte-téléphone et équipement de pluie.

Nos véhicules utilitaires légers ont également été remplacés par des vélos équipés de remorques. Deux configurations ont été testées. La remorque électrique de K-ryole mesure en temps réel les efforts réalisés et les données récoltées permettent à l’intelligence embarquée dans le dispositif de piloter les deux moteurs placées dans les roues. Fleximodal couple plutôt vélo électrique et solution de conteneurisation facilitant le transfert de marchandises. Nous avons testé un conteneur rigide muni d’étagères modulables permettant de charger jusqu’à 12 bacs.

Notre réflexion s’est également portée sur les services complémentaires que nous pouvions proposer dans le cadre de la livraison. Ainsi, pour augmenter le recyclage et valoriser au mieux les déchets, nos livreurs sont aujourd’hui en mesure de récupérer les denrées non périssables chez nos clients, mais également les fruits et légumes encore en bon état ainsi que les piles et les ampoules usagées. Nous avons également testé la suppression des sacs en plastique pour les remplacer par des contenants alternatifs, comme des bacs consignés ou des sacs en kraft.

Quelles ont été les phases d’expérimentations de Hestia dans le cadre d’Urban Lab ?

La définition précise des expérimentations que nous souhaitions mettre en place a été réalisée en interne et soumise sous forme de feuille de route à Urban Lab, dès le mois de mars 2018. Ce dernier nous a ensuite orienté pour que notre phase de test puisse répondre à des questions essentielles : nos services sont-ils opérationnels ? Ont-ils un bénéfice environnemental mesurable ? Peuvent-ils être industrialisés après la phase d’expérimentation ?

Depuis le début du test sur le terrain, au mois d’avril 2019, nous avons rencontré les équipes d’Urban Lab à quatre reprises, afin d’échanger sur le déroulé du projet. Après une phase interne d’études et de recherche portant sur les pratiques de distribution urbaine, nous avons défini nos axes de travail autour de quatre grands piliers : la livraison à pied, la livraison à vélo, l’ergonomie des équipements du livreur et la reprise des déchets. Des durées références d’expérimentation ont ensuite été définies pour chacun des leviers afin de mesurer à terme les bénéfices environnementaux et sociétaux. Le magasin Vincent Auriol, dans le 13^e arrondissement, est ensuite devenu le laboratoire du projet Hestia, grâce à l’implication directes des équipes.

Un livreur du projet Hestia devant le magasin test Vincent Auriol (13e arrondissement)
© Emily Merick/Monoprix

Nous avons également participé à la rencontre avec les autres porteurs de projets, ce qui nous a permis d’échanger sur chacune des expériences.

Après ces six mois de test terrain, percevez-vous déjà des impacts positifs ?

Nous avons eu des retours très positifs. Au sein du magasin test, une campagne d’affichage avait informé la clientèle du dispositif de test des livraisons à vélo, ce qui a totalement été plébiscité. Nous demandons régulièrement à nos clients d’évaluer nos services, et le magasin Vincent Auriol détient la meilleure note de France pour la livraison à domicile, preuve que nos nouveaux services fonctionnent.

Les livreurs, de leur côté, ont également été très ouverts à cette évolution de leur mission. Ils ont d’ailleurs été formés et ont été accompagnés dans le processus. Au quotidien, livrer à vélo leur permet d’être plus ponctuels en évitant les bouchons, qu’ils subissaient en véhicule utilitaire.

Y-a-t-il encore de nouvelles phases de développement prévues ?

L’expérimentation d’Hestia se termine à la fin du mois d’octobre dans la zone Paris-Rive-Gauche. Si la majorité de ce que nous avons testé va être pérennisée au sein même de notre magasin test, le but sera de les étendre à d’autres magasins parisiens, voire en région à plus long terme.

Suite au succès de la récolte des denrées non périssables, fruits et légumes ou encore ampoules ou piles, plusieurs sollicitations ont été directement émises par nos clients. Nous allons donc étendre le service aux dons de vêtements, qui seraient consignés dans les bornes Le Relais par nos livreurs. Ce nouveau service est en cours de réflexion, en lien direct avec la Direction de la Voirie et des Déplacements de Paris, pour installer un conteneur de récolte proche du magasin Vincent Auriol.