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Le projet de loi Energie-Climat : vers la neutralité carbone pour 2050
Les débats se poursuivent sur le projet de loi Energie-Climat, qui vise à rehausser les ambitions de la politique énergétique française, avec l’objectif de neutralité carbone pour 2050. Le texte a été adopté le 11 septembre par les députés et sera soumis au vote des sénateurs à la fin du mois de septembre.
Après l’adoption des premières mesures en juin 2019, et l’inscription de « l’urgence écologique et climatique » dans la loi, certaines dispositions du projet de loi ont suscité le débat, donnant lieu à de nombreuses propositions d’amendements des parlementaires. Les députés et sénateurs, réunis en commission mixte paritaire, sont parvenus depuis, à s’accorder sur la version finale du texte, le 25 juillet 2019.
Actualiser les objectifs de la loi sur la transition énergétique
Le projet de loi relatif à l’énergie et au climat vient actualiser certains objectifs fixés par la loi relative à la transition énergétique et la croissance verte adoptée en 2015.
La mesure phare du projet de loi est l’atteinte de la neutralité carbone à l’horizon 2050. Le texte du projet de loi remplace l’objectif de facteur 4, c’est-à-dire la division des émissions de gaz à effet de serre par quatre, par l’objectif ambitieux de neutralité carbone, soit une division par six des émissions de gaz à effet de serre et la compensation des émissions restantes. Le projet de loi s’inscrit ainsi dans le prolongement des engagements pris par la France avec l’Accord de Paris.
Enfin, le texte de 2015 qui prévoyait une réduction de 30 % de la consommation énergétique primaire des énergies fossiles en 2030, est mis à jour avec le projet de loi qui relève cet objectif en prévoyant une réduction de 40 %. En outre, ce recul des énergies fossiles se traduit par une disposition qui vise à mettre un terme à la production d’électricité à partir du charbon dès 2022. L’objectif de réduire de moitié la part du nucléaire dans la production d’électricité, initialement prévu pour 2025, est reporté pour 2035.
Redéfinir les objectifs de la politique énergétique
Le projet de loi fixe des objectifs précis en matière d’économie d’énergie et de développement de la part des énergies renouvelables dans la consommation finale brute :
- Réduction de la consommation d’énergie finale de moitié pour 2050 (par rapport à 2012), avec des objectifs intermédiaires pour 2023 (7 %) et 2030 (20 %).
- Rehausser la part des énergies renouvelables, avec un objectif d’au moins 33 % de la consommation finale brute pour 2030.
Cela sera possible en développant les différentes filières d’énergies renouvelables : des objectifs pour augmenter les capacités de production électrique ont été fixés pour l’éolien offshore et l’hydrogène bas-carbone. Afin de développer les installations de production innovantes, des appels à projets et des contrats d’expérimentation pourront être lancés.
Les projets de production d’énergies renouvelables et de biogaz seront sélectionnés dans le cadre des appels d’offres en prenant en compte leur bilan carbone. Le texte du projet de loi permettra d’encadrer le développement des installations photovoltaïques auprès des autoroutes et des parkings. Enfin tout projet de construction de plus de 1 000 m2 d’emprise au sol, sera soumis à une obligation d’installation d’énergies renouvelables en toitures, ou de végétalisation.
Des panneaux solaires sur les toits de Paris – © Sophie Robichon, Ville de Paris
Des objectifs rehaussés tous les 5 ans
En effet, à compter de 2023, un texte législatif viendra déterminer tous les 5 ans les objectifs et priorités d’action en matière de politique énergétique. Cette loi précisera les objectifs de réduction de la consommation d’énergie finale, et de la consommation d’énergie primaire fossile, fixera les obligations d’économie d’énergie et les objectifs en matière de développement des énergies renouvelables et de rénovation des bâtiments. Cette loi est un moyen de concerter les parlementaires et de compléter la Programmation Pluriannuelle de l’Energie (PPE) adoptée par décret, le budget carbone, ainsi que la Stratégie Nationale Bas Carbone, avec lesquels elle devra être compatible.
Enfin, un rapport sur les incidences positives et négatives du projet de loi de finances pour 2020 sur le réchauffement climatique devra être remis au Parlement par le Gouvernement avant le 1er octobre 2019.
Le projet de loi prévoit aussi d’accélérer la mise en conformité du droit français avec les objectifs européens en matière de politique énergétique. Ainsi, le Paquet Climat Energie devra être transposé en droit français dans un délai de 6 mois à compter de la publication de la loi.
Un Haut Conseil pour le Climat pour le suivi de ces objectifs
Afin d’évaluer la trajectoire de baisse des émissions de gaz à effet de serre, au regard des objectifs qu’il s’est fixé, l’Etat institue le Haut Conseil pour le Climat, un organe indépendant, placé auprès du Premier Ministre, rassemblant des experts et scientifiques pluridisciplinaires. Le projet de loi vient donc définir le rôle et les modalités de fonctionnement de cet organe, qui sera chargé d’émettre tous les ans dans un rapport, un avis et des recommandations pour améliorer l’action de la France en matière de climat.
Encourager la rénovation énergétique des logements
Audit énergétique par © NicoElNino
Enjeu majeur de la transition énergétique, la rénovation des logements et en particulier des « passoires thermiques » a fait l’objet de nombreux débats entre les parlementaires.
Le texte du projet de loi ne détermine pas les critères de performance énergétique définissant les logements indécents. Cela sera défini a posteriori dans un décret qui s’appliquera à partir de 2023.
Le projet se concentre donc sur les logements de catégories F et G et prévoit une procédure progressive, en 3 étapes, pour permettre aux propriétaires de s’adapter et d’engager des travaux de rénovation :
- L’incitation : à partir de 2022, les publicités et les actes relatives à la vente ou à la location devront afficher l’obligation de travaux exigée aux propriétaires. Les logements de catégorie F ou G du diagnostic de performance énergétique devront être rénovés de sorte à ce qu’ils soient désormais classés en catégorie E pour 2023.
Une exception est accordée aux copropriétés en difficulté qui auront plus de temps pour réaliser des travaux de rénovation, avec une échéance fixée à 2033. De plus, en cas de non-respect de l’obligation, le bailleur pourra être exempté des sanctions, s’il démontre qu’en raison du processus de décision spécifique aux copropriétés, des travaux n’ont pas pu être engagé. - L’obligation de conformité : des certificats ne seront plus délivrés aux logements de catégories les plus énergivores entre 2023 et 2028. Les propriétaires seront tenus d’informer les locataires ou acquéreurs du non-respect de l’obligation de travaux si ceux-ci n’ont pas été réalisé.
- Sanctions en cas de non-respect : à partir de 2028, des sanctions seront prévues pour les logements ne respectant par l’obligation de conformité. Celles-ci seront définies dans le cadre de la première loi quinquennale relative à la politique énergétique, à partir de 2023.
Quelques exceptions sont prévues : certains logements pourront être exemptés de cette obligation de rénovation, en raison des contraintes techniques, architecturales ou du coût disproportionné des travaux au regard de la valeur du bien.
La révision du loyer des logements énergivores bloquée
À partir de 2021, les bailleurs privés des logements énergivores de classes F et G ne pourront plus augmenter le loyer librement entre deux locataires sans avoir effectué des travaux de rénovation. La révision du loyer sera ainsi soumise à la réalisation de travaux permettant d’atteindre à minima la classe E du diagnostic de performance énergétique.
Audit énergétique obligatoire dès 2022
Lors de la vente ou de la location d’un logement de classe F ou G, un audit énergétique devra être réalisé. Cet audit préconisera les travaux pour la mise en conformité de ces logements énergivores, et précisera le coût des rénovations, informera sur les aides financières et estimera les économies d’énergie possibles après réalisation des travaux.
Dans le cadre du programme Eco-Renovons Paris, la Ville de Paris et l’Agence Parisienne du Climat accompagnent les copropriétés parisiennes dans leurs travaux de rénovation. Les copropriétés parisiennes peuvent bénéficier du chèque à l’audit, une aide pour financer la réalisation d’un audit global.
Quelques évolutions pour les entreprises et maîtres d’ouvrage
- Améliorer le reporting des grandes entreprises et des sociétés de gestion de portefeuille
Tenues d’élaborer un bilan de leurs émissions de gaz à effet de serre, les grandes entreprises de plus de 500 salariés et les collectivités territoriales devront également élaborer un plan de transition au sein duquel seront détaillés les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre, ainsi que les moyens et actions envisagés pour respecter ces objectifs.
Par ailleurs, les sociétés de gestion de portefeuilles seront tenues d’informer sur les risques climatiques et les risques liés à la biodiversité des investissements.
- Préciser les modalités de l’évaluation environnementale au cas par cas pour les maîtres d’ouvrage
La procédure de l’évaluation environnementale au cas par cas, qui figure dans le Code de l’environnement et permet d’évaluer les impacts environnementaux et sanitaires des projets qui y sont soumis, sera détaillée et ses modalités précisées.
- Lutter contre les fraudes de certificats d’économie d’énergie (CEE)
- Maîtriser le prix de l’énergie avec la fin des tarifs réglementés pour le gaz et l’électricité
La version finale du texte proposée par la commission mixte paritaire a été adopté par les députés à l’Assemblée Nationale le 11 septembre. Le Sénat se prononcera quant à lui le 26 septembre prochain.