[Série technique rénovation] – Episode 3 : Végétaliser une dalle, c’est possible
Les aménagements urbains sur dalle sont des sols artificiels généralement construits au-dessus d’espaces creux : certaines cours d’immeuble reposent sur une dalle, notamment lorsqu’un parking est disponible en sous-sol pour les habitant·es. Ces cours peuvent tout à fait accueillir un projet de végétalisation, malgré l’artificialité du sol. Comment s’y prendre alors pour y aménager un espace vert ? Quels sont les points de vigilance et contraintes à connaître avant de lancer sa copropriété dans un tel projet ?
Dans cet article, nous faisons référence au projet de végétalisation de la dalle Beaugrenelle, présenté en détail dans la fiche solution AdaptaVille « Végétaliser les abords des immeubles sur dalle : l’exemple de la dalle Beaugrenelle ». Toutefois les points de vigilance et enseignements sont les mêmes dans le cas d’un projet de végétalisation sur dalle en copropriété.
Les contraintes techniques liées aux dalles
Les cours sur dalle possèdent les mêmes contraintes techniques qu’une toiture, notamment la portance de la dalle ainsi que son étanchéité.
La portance de la dalle
Quelle est la masse maximale que la dalle peut supporter ?
C’est à cette question qu’il faut répondre avant d’envisager d’y créer un jardin. En effet, végétaliser une dalle consiste à y ajouter des éléments avec une masse non négligeable, notamment celle d’un substrat gorgé d’eau et des végétaux qui y poussent. A la construction, l’ouvrage est prévu pour une portance bien déterminée, en lien avec ses usages (voies piétonnes, jardins, espaces vierges, etc), qui peuvent évoluer.
« Dans le cas d’une végétalisation intensive, la dalle doit porter pouvoir porter des éléments vraiment lourds. Cela peut aller jusqu’à une tonne du m² dans certains très gros projets ! Pour s’assurer que la structure de la dalle est conforme à l’ambition du projet, il faut retrouver la valeur de la capacité portante de la dalle dans les documents techniques rédigés lors de sa construction. Si ces documents ne sont pas disponibles, il faut alors réaliser une étude structure », Laura Carrillo, responsable technique chez Ecovégétal, entreprise spécialisée dans la végétalisation de toitures et la création de parkings perméables.
L’étanchéité de la dalle
Comme explicité dans le 1er article de la série technique sur l’étanchéité des toitures terrasses couplée à un complexe de végétalisation, il y a un certain nombre de règles à respecter qui s’appliquent également à la végétalisation d’une cour sur dalle.
Laura Carrillo précise d’ailleurs que :
- Il est interdit de planter des arbres à grand développement ;
- Une dalle étant la plupart du temps une surface plane, un drain est nécessaire sous le substrat afin d’acheminer les eaux pluviales en surplus vers le réseau d’assainissement.
Schéma d’un complexe étanchéité-végétalisation type © Règles Professionnelles Toitures Terrasses Végétalisées Adivet.
Quid de l’entretien du complexe végétalisé sur dalle ?
Une dalle végétalisée s’entretient et nécessite, tout comme les toitures végétalisées, d’être arrosée. En effet, ce n’est pas un système naturel et la rétention d’eau est moins importante que pour un jardin en pleine terre.
Il faut prévoir un point d’eau afin d’assurer l’entretien minimal de la végétation ! Vous retrouverez ces informations dans l’épisode 1 de la série technique.
Gestion des eaux pluviales dans le cas d’une végétalisation sur dalle
La gestion dite « intégrée » des eaux pluviales consiste à capter celles-ci « à la source », au plus près de là où la pluie tombe. Cela revient finalement à voir l’eau comme une ressource et non pas comme un déchet. Lorsque l’on se situe sur une dalle, cette gestion des eaux pluviales va se faire en comptant sur le processus d’évapotranspiration des plantes. En effet, le fait d’être sur une dalle ne permet pas de faire de l’infiltration.
Selon Laura Carrillo, « l’espace végétalisé agira comme un espace tampon, on parle de gestion temporaire des eaux pluviales ».
Laure Fass, du Service Technique de l’Eau et de l’Assainissement de la DPE (Direction de la Propreté et de l’Eau), précise qu’il est difficile d’estimer la quantité d’eau qui pourra être évapotranspirée, mais que les eaux courantes pourront être gérées, temporairement, par un espace vert avec étanchéité. Elle explique également que pour gérer les eaux pluviales à la parcelle dans une cour sur dalle, il faut que l’espace végétalisé puisse accueillir les eaux pluviales et donc se situer en point bas de la dalle : « il est possible de décaisser la partie de la dalle qui se trouve au-dessus du toit de celle-ci, et d’y ajouter le complexe de végétalisation ».
S’il n’est pas possible de casser cette partie de la dalle, alors une autre éventualité est d’ajouter le substrat par-dessus, et de faire en sorte d’acheminer les eaux pluviales vers l’espace végétalisé.
Pour aller plus loin dans l’ambition du projet et gérer également les pluies intenses, il est nécessaire d’augmenter la capacité de stockage de l’eau sous le substrat. Laura Carrillo mentionne notamment les dalles alvéolaires qui peuvent recevoir une certaine quantité d’eau afin de temporiser davantage l’évacuation des eaux pluviales vers le réseau d’assainissement. Elle explique que « des limiteurs de débit régulent l’évacuation de l’eau en fonction des exigences des Plans Locaux d’Urbanisme (PLU) ».
En Île-de-France, les eaux courantes correspondent à une lame d’eau allant jusqu’à 10mm en 24h. Les espaces verts étanchés tels que les dalles végétalisées ou encore les toitures végétalisées permettent de gérer 80 % de ces eaux pluviales dites « courantes ».
La végétalisation de la dalle Beaugrenelle : deux types d’implantation des végétaux
Les jardinières
Une grande partie des végétaux de la dalle Beaugrenelle ont été plantés dans des jardinières. Celles-ci, souvent assez étendues en surface, sont limitées en profondeur et ne peuvent accueillir que des plantes appartenant aux strates herbacées, buissonnantes ou arbustives.
Jardinière de la dalle Beaugrenelle. ©APC
Les fosses de plantation
Les arbres de la dalle Beaugrenelle ont en grande partie été plantés dans des fosses de plantation qui plongent sous la dalle. Ces fosses coniques ont été construites en même temps que la dalle et reposent sur des piliers qui permettent de leur assurer une portance suffisante pour le substrat gorgé d’eau ainsi que les arbres qui pèsent également très lourd. Ces fosses plongent dans les étages inférieurs de la dalle, dans le parking.
Fosse de plantation de la dalle Beaugrenelle. ©Agence Parisienne du Climat
Végétaliser sa cour sur dalle en copropriété en intégrant le dispositif CoprOasis
La Ville de Paris a mis en place le dispositif CoprOasis permettant d’accompagner techniquement et financièrement les copropriétés parisiennes dans leurs projets de désimperméabilisation et de végétalisation.
Les projets de végétalisation de cour sur dalle sont éligibles à ce dispositif, à condition de respecter les critères minimaux suivants :
- Gérer les eaux pluviales courantes de la cour ;
- Maintenir ou augmenter la surface végétalisée de la cour (10% de la cour minimum doit être végétalisée) ;
- Prévoir 2 strates de végétation ;
- Intégrer 1 arbre fruitier à partir de 3 arbres plantés.
Pour plus d’informations, vous pouvez consulter notre article dédié à CoprOasis. L’Agence Parisienne du Climat est le point d’entrée pour en bénéficier !